Fin d’une époque, celle de la génération des nés d’avant-guerre qui se sont retrouvés avec leurs vingt ans dans l’Europe magique des sixties. La Yougoslavie de Tito fonctionnait encore comme le rêve d’une communauté européenne idéale: Vladimir Veličković y réalise, à Belgrade, sa première exposition en 1963. Le passage à Paris est naturel, le rideau de fer ne s’est pas abattu sur l’ancienne Serbie désormais alliée des autres Slaves du sud pour le meilleur et bientôt pour le pire. Il reste néanmoins fidèle à sa patrie qu’il représente en 1972 à la Biennale de Venise. La consécration est au rendez-vous dans les années 80 et ce sont des vacances répétées et presque paisibles sur la riviera adriatique, dans l’atmosphère surannée de l’hôtel Argentina de Dubrovnik, en famille et entre amis. Là, sur le terrain de terre battue aujourd’hui disparu pour satisfaire les normes des nouveaux touristes, nous nous retrouvions avec Vlada pour satisfaire son violon d’Ingres: le tennis. On pouvait comprendre avec son jeu le souci du corps humain qui a traversé son œuvre, en réalité le souci de son propre corps qu’il observait en même temps qu’il tapait sur la balle, tentant de s’inscrire dans une réalité qui allait bientôt nous glisser des doigts. Il gagnait souvent malgré son âge double du mien. Redevenu Serbe à cause de la guerre, Français d’adoption à cause de son art, Vlada est mort à Split, la magnifique retraite de l’empereur Dioclétien, le 29 août 2019, à 84 ans.

(APG)

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